L’Art-thérapie

Connaissez-vous bien l’art-thérapie?

Comment fonctionne l’art-thérapie

L’art-thérapie est une thérapie à médiation artistique. C’est-à-dire qu’elle emploie la créativité à des fins thérapeutiques pour cheminer vers un mieux-être.

Contrairement aux pratiques psychothérapeutiques classiques qui reposent souvent sur la parole et l’analyse verbale, l’art-thérapie offre un espace où les émotions, les pensées et les tensions sont exprimées à travers la créativité, sans avoir à recourir systématiquement aux mots. Ainsi, cette méthode permet à la personne de se libérer des tensions émotionnelles et des blocages sans la pression d’une verbalisation.

Chaque action devient un moyen d’aller à la rencontre de soi, de ses émotions et de ses blessures, tout en respectant un tempo personnalisé. Elle peut avancer à son propre rythme, en toute confiance, guidée par l’accompagnement doux du thérapeute.

L’art devient ainsi un véritable langage de guérison. Les gestes créatifs, l’exploration de formes, de couleurs, de sons ou de mouvements permet à la personne de donner vie à ses émotions et de les transformer.

L’art-thérapie permet donc de travailler sur des blocages émotionnels et psychiques sans avoir à passer par le filtre de la verbalisation. Chaque geste artistique, qu’il soit spontané ou réfléchi, devient un miroir des états intérieurs. Cela ouvre la voie à une prise de conscience douce et bienveillante et permet de trouver des solutions ou des perspectives nouvelles face à ses difficultés.

L’accent est mis sur le processus créatif plutôt que sur un résultat esthétique.

En utilisant des médiums comme la peinture, le dessin, la sculpture, ou encore la musique et la danse, l’art-thérapeute guide chaque individu selon son propre rythme, sa motricité et en respectant ses besoins, ses émotions et son histoire.

Les différentes familles d’art-thérapies

Parmi les grandes familles des thérapies utilisant la création artistique, nous pouvons en citer plusieurs: il y a l’art-thérapie à médiations plastique et visuelles (utilisée ici à l’atelier d’art-thérapie et de créativité à Chexbres), la musicothérapie, la dramathérapie et la thérapie par la danse et le mouvement.

Notons que peu importe que l’on sache dessiner ou non, danser ou non, jouer d’un instrument ou non. Par exemple, en art-thérapie plastique et visuelle, il s’agit de se laisser guider par les couleurs, les matières, les images, et d’être à l’écoute de ses ressentis pendant la création et l’observation de celle-ci. En musicothérapie, on utilise les sons, les tonalités, les vibrations. La musicothérapie peut être par exemple utilisée auprès des prématurés permettant de ralentir leur fréquence respiratoire, régulariser leur rythme cardiaque ou apaiser les parents. Alors qu’en danse-thérapie on utilise le mouvement pour ressentir et dénouer des blocages ou des traumas au-travers du corps.

Le processus créatif, les productions réalisées et la guidance de l’art-thérapeute permettent une reconnexion profonde à soi, par des mécanismes internes dont les preuves sont maintenant reconnues. De plus en plus d’hôpitaux utilisent l’art-thérapie.

L’art-thérapeute

L’art-thérapeute est une personne qui a fait une formation reconnue en art-thérapie. En Suisse, ces praticiens doivent avoir initialement soit une formation en art ou dans le domaine médical ou social. Il est tenu de faire des formations continues et des heures de supervision chaque année. Ces exigences garantissent ainsi une qualité professionnelle.

Quelle que soit la thérapie parmi celles citées ci-dessus, ces thérapeutes sont témoins et accompagnent le regard sur le processus et la création par des questions, des propositions ou des observations. Ceci bien sûr dans un cadre relationnel thérapeutique bienveillant et confidentiel.

Le praticien en art-thérapie est là pour rendre possible cette exploration par la créativité, quel que soit son langage et sa mobilité. Il est tenu de faire des formations continues et des heures de supervision chaque année.

Je suis art-thérapeute diplômée en art-thérapie à médiation plastique et visuelle. C’est-à-dire que le matériel créatif utilisé s’inspire principalement des arts plastiques comme la peinture, le dessin, les craies, le collage, le modelage et tout objets qui peut être utilisé, collé, transformé, etc… Parfois je peux proposer des moments en mouvements ou musicaux, mais ce n’est pas de la musicothérapie à proprement parlé. Et bien que j’aie fait une formation continue en danse et mouvements thérapie, je n’ai pas le diplôme en danse-thérapie. J’utilise donc les médiations plastiques citées ci-dessus.

Depuis quelques années, j’accompagne plus spécifiquement des personnes présentant une mobilité réduite ou un langage non verbal. Des moyens comme la guidance dans les gestes ou des moyens auxiliaires comme des attelles ou des outils appropriés sont alors utilisés.

L’art-thérapie pour qui ?

Tout le monde peut en bénéficier, quel que soit sa motricité ou sa capacité à s’exprimer verbalement. En un mot, l’atout de l’art-thérapie est qu’elle convient à tout âge dès 4-5 ans et à toutes personnes. L’art-thérapeute est là pour rendre possible cette exploration de soi par la créativité, quel que soit son langage et sa mobilité.

Ainsi, comme l’art-thérapie utilise un langage qui peut se passer du verbal, elle est donc intéressante aussi pour :

• les enfants qui n’ont pas encore tout le vocabulaire nécessaire pour exprimer leur ressenti ou émotions
• les personnes présentant des troubles du langage dû par exemple à un AVC
• les personnes  avec une démence due à l’âge, comme la maladie d’Alzheimer
• les personnes ayant une mobilité réduite
• les personnes autistes ou neuro-atypiques : accès à une communication non verbale et canalisation des ressentis.
• les personnes dont l’expression verbale demande beaucoup d’effort
• les personnes qui ont envie de se faire du bien avec une thérapie non verbale

Il n’est pas nécessaire d’avoir une pratique artistique pour bénéficier de l’art-thérapie.

Quels sont les bienfaits de l’art-thérapie?

 

Déroulement d’une séance d’art-thérapie

Généralement, une séance individuelle d’art-thérapie dure 60 minutes. Elle débute par un moment d’accueil. Ensuite, un moment pour s’accueillir soi-même pour débuter la séance en tant que tel. Ce temps peut agir comme un stimulus pour se connecter à la créativité. Cela peut être par exemple le tirage d’une carte couleur, une image sur un thème particulier, ou la lecture d’un poème. Ensuite vient un moment de création, libre ou guidée par l’art-thérapeute. Puis un moment de partage, de regards croisés de la personne et de l’art-thérapeute sur l’œuvre crée, ainsi que sur le processus de création, les ressentis de la personne pendant qu’elle créait. Pour terminer la séance, un moment pour conclure.

Il arrive parfois que l’art-thérapeute guide, créé avec, ou en guidance, en accompagnant les gestes de la personne si celle-ci en a besoin. L’art-thérapeute s’adapte vraiment au rythme, au langage ainsi qu’à la mobilité de la personne.

Les séances individuelles durent 60 minutes. Il est également possible de faire des séances de groupe sont possible. Elles durent 90 à 120 minutes et ont lieu avec minimum 4 personnes.

Comment se passe des séances d’art-thérapie pour une personne avec Alzheimer ?

La maladie d’Alzheimer se manifeste principalement par des troubles de la mémoire, mais elle peut aussi affecter le langage, la motricité, l’organisation, l’humeur, et entraîner une perte de repères et de motivation. L’art-thérapie permet ici :

• De rompre l’isolement par une relation régulière et soutenante.
• De proposer moment de relaxation et de plaisir par la créativité
• De vivre le moment présent et lâcher prise par rapport au quotidien parfois confrontant ses difficultés
• De stimuler la communication, même sans recours au langage verbal.
• Diminuer l’anxiété et trouver une sérénité
• Se raconter, peu importe l’ordre et la véracité des souvenirs
• De renforcer son estime de soi et une image de soi satisfaisante
• De se reconnecter à son identité
• D’éprouver une capacité de rentrer en communication avec autrui et son entourage
• De retrouver sa dignité en se sentant écouté et validé
• Trouver ou retrouver du plaisir et épanouissement dans une activité ludique et créative
• Une régularité des séances qui permet un rythme dans la semaine

La richesse des propositions de créer en art-thérapie est tel que ce serait très long à écrire. Il existe d’ailleurs des ouvrages sur le sujet.

Voici un exemple d’accompagnement art-thérapeutique pour des personnes atteintes d’Alzheimer, loin d’être exhaustifs :

A l’EMS par exemple, comme art-thérapeute, je me présente à chaque fois en disant mon prénom, en disant bonjour et demandant comment la personne se sent aujourd’hui. Puis je lui propose de m’accompagner, en invitant à découvrir l’atelier, un espace de détente, un moment pour discuter, écouter de la musique, créer. La relation calme, douce et bienveillante est primordiale. Il est essentiel aussi d’aller au rythme de la personne. Les images, les sons, les textures servent de médiateur pour ouvrir à la parole, ou simplement au ressenti. Les images et photos sont une belle source pour entrer en discussion, évoquer des souvenirs. La personne peut raconter, ou cela peut s’agir d’un seul mot exprimé. L’expression peut se situer aussi dans le non-verbal, comme un regard qui s’ouvre ou un sourire à la vue d’une image. Une personne peut ne prononcer qu’un mot, ou simplement esquisser un sourire : ces micro-expressions sont des portes vers la création. L’art-thérapeute saisit cet instant, et selon la situation, invite à un moment de création.

Parfois, avant que la personne arrive, je prépare une palette de peinture avec maximum 5 couleurs, et une feuille. Quand la personne arrive, elle peut avoir le réflexe de prendre le pinceau, tout est prêt.

D’autres fois, la personne crée en guidance. Il suffit alors que je pose délicatement ma main sur la sienne pour que je perçoive un infime mouvement. Je suis à l’écoute de ce mouvement, et je l’accompagne, en l’amplifiant petit à petit, sans forcer.

C’est en tout les cas un moment différent du quotidien, où la personne est dans l’instant présent tout en ayant l’occasion de communiquer librement, dans un endroit calme et sécure, et ce, en mode verbal ou non verbal. Cela donne un moment de stimulation visuelle, gestuelle et relationnelle.

Comment se passe une séance d’art-thérapie pour une personnes avec une mobilité réduite ?

Cela dépend tout des facultés à se mobiliser. A nouveau, je donnerai un exemple, mais il peut se décliner en autant de personnes que l’on est sur Terre.

Prenons une personne dont la mobilité lui demande une aide pour toutes les activités de la vie quotidienne. Les gestes du quotidien sont répétés, chaque jour les mêmes. L’art-thérapie devient un espace d’exploration sensorielle et corporelle.

L’art-thérapeute peut par exemple proposer une attelle pour tenir une bouteille de peinture, un pinceau, un rouleau. Elle peut ensuite guider le bras de la personne pour peindre, mélanger, déchirer du papier. Ainsi, au niveau corporel, la personne va ressentir des gestes et sensations différentes du quotidien. Cela peut être le poids d’une bouteille de peinture, une sensation de vibration dans la main et le bras lorsqu’elle déchire du papier, des gestes en cercles pour mélanger de la peinture, ressentir l’onctuosité d’une peinture, être stimulé visuellement par les couleurs et leurs mélanges, ressentir la texture de différents papiers en passant sa paume dessus, sentir la température de la peinture sur les mains, etc…Puis, en fin de séance, voir ses créations réalisées.

C’est une occasion de ressourcement du corps et l’esprit par une médiation corporelle, mais aussi une occasion de choisir et décider, et d’avoir la satisfaction de réaliser une création, de laisser une trace sur papier.  

Comment se passe des séances d’art-thérapie pour une personnes avec un enfant?

L’art-thérapie pour l’enfant peut lui permettre d’oser, de choisir, de décider, de s’exprimer, et de prendre confiance en lui, ou résoudre des difficultés intérieures à travers des symboles et des histoires. Dans le cadre de la thérapie, cela se produit par des activités créatrices, en construisant, expérimentant différentes matières, et en jouant.

L’art-thérapeute accompagne l’enfant dans ses choix. Lorsqu’un enfant est confronté à une difficulté technique dans la réalisation d’une œuvre, l’art-thérapeute ne va pas lui dire comment faire et comment contourner cette difficulté. Il ou elle va questionner la création ou l’enfant par rapport à sa création, pour lui permettre de cheminer et expérimenter une solution que lui trouvera par lui-même. Le thérapeute peut ensuite l’inviter à se promener dans l’atelier pour voir si une matière, un objet pourraient l’aider dans son processus. Indirectement, l’enfant construit ainsi sa confiance en lui, car il aura trouvé des solutions par lui-même.

Parmi les outils thérapeutiques, le jeu est aussi très utilisé avec les enfants. Construire des personnages par exemple en marionnettes ou en argile, et inventer des histoires lui permet dans son inconscient psychique de revisiter des situations et de leur donner une issue que lui-même aura choisi. Cela développe le sentiment d’être maître de soi ainsi que l’imaginaire.

La construction de personnages peut se faire avec tout objet et matière. Personnellement, j’apprécie particulièrement la pâte à sel. Cette matière est créée à partir de 3 ingrédients basiques : eau, farine et sel. Lorsque l’enfant veut faire des personnages en pâte à sel, je lui propose toujours s’il veut réaliser cette pâte lui-même. C’est souvent le cas. Mélanger sel farine et eau puis pétrir est déjà une expérience sensorielle en soi. Et l’histoire et ses personnages se construisent depuis le tout début. A partir de ces 3 ingrédients de base, l’enfant est véritablement un créateur.

Accueillir quelqu’un en séance d’art-thérapie, c’est lui dire:

(Dans ce poème, le « tu » est utilisé.)

Ici…

Ici, c’est un moment pour toi.

Ici, tu peux créer

Ici, tu peux choisir

Ici, tu peux inventer

Ici, tu peux dire, tu peux ne pas dire, tu es libre de dire ce que tu veux, quand tu veux.

Ici, ce que tu dis ou fais reste ici.

Ici, tu peux faire. Et si ça ne va pas comme tu as fait, tu peux défaire.

Ici, il n’y a pas de faux.

Ici, tu peut faire du beau et du moche.

Ici, tu peux transformer.

Ici, c’est toi qui décides ce que tu veux faire.

Ici, si tu as envie de rire, dire, pleurer, te fâcher, du peux. Toutes les émotions sont accueillies, tout autant que tu es accueilli.

Ici, je suis là et je t’accompagne. Je ne montre pas tes créations à quelqu’un d’autre, et je ne répète pas ce que tu m’as dit.

Ici, je regarderai avec toi ce que tu as fait et comment.

Et puis, on parlera, ou on regardera juste.

Ici, c’est ton atelier à toi pendant le temps que tu es ici.

Sylvie Moura